18/05/2024
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Par Jennifer Tremblay. Fable sur la disparition d’un lieu, mais aussi sur les souvenirs qui s’effacent, sur la perte, sur le deuil,Sortir la tempête du verre, le nouveau spectacle de Stéphane Guertin, aborde le riche sujet d’une fin inéluctable et de ses effets. Inspirée de l’histoire bien réelle de Kirk’Ferry, un village construit aux abords de la rivière Gatineau, inondé en 1926 lors de la construction du barrage de Chelsea par la compagnie Gatineau Power.
Cette histoire rappelle à notre mémoire une multitude d’évènements historiques du même genre.
Chacun peut se projeter à sa manière dans ce récit car, au sens propre comme au sens figuré, n’a-t-on pas tous fait l’expérience de sentir notre vie partir à la dérive ? « Il y a des sentiments reliés aux lieux », affirme le conteur qui a vite pris conscience de la dimension universelle et intemporelle de son récit. « Après les représentations, on me parle de tel ou tel village disparu sous les eaux. Les gens ont vécu, ou sont les descendants de gens qui ont vécu des situations comme celle-là. Même à l’étranger, ça résonne ! »
Immédiatement après sa création, Sortir la tempête du verre a été présenté en France, en Ontario, puis aux Îles-de-la-Madelaine. Le conteur n’avait pas véritablement pris la mesure du côté poignant de sa proposition avant les premières représentations. « Aux Îles, les gens ont beaucoup rigolé pendant mon show, parce que c’est souvent drôle ! Mais à la fin, quand j’ai salué, j’ai vu que des gens pleuraient… »
L’idée de départ, donc, était de raconter l’inondation du village de Kirk’s Ferry dans le contexte de construction d’un barrage. Stéphane Guertin voulait d’abord mettre de l’avant l’évènement historique, qui n’a pas laissé beaucoup de traces. On aura beau chercher dans les alentours de Chelsea, en Outaouais, on ne trouvera pas de panneau indiquant qu’à cet endroit, dans les eaux de la rivière, se trouve la vie immergée de gens qui n’ont pas vraiment eu le choix de quitter leur maison à tout jamais. Mais en menant des laboratoires d’exploration artistique, l’artiste s’est peu à peu détaché de l’évènement historique pour s’approcher de la fable… « Ça donne un spectacle plus poétique qu’académique ! Aussi, je ne voulais pas raconter cette histoire de manière linéaire, explique-t-il. En fait, le récit est composé de différents contes qui s’additionnent pour raconter ces bouleversements sous différents angles. »
Il a entre autres choisi de raconter le point de vue d’Anne, la fille du capitaine du traversier qui permettait d’aller d’une rive à l’autre de la rivière. Anne est une petite fille au moment où son monde disparait sous les eaux. Princesse à la dérive, elle doit migrer en haut de la montagne, car c’est là qu’on reconstruira le village. « Je me suis inspiré d’un souvenir que j’ai gardé de ma grand-mère. À la fin de sa vie, elle souffrait d’Alzheimer. Un jour, elle a disparu. On la cherchait partout. En fait, elle s’était échappée pour retourner à la maison où elle avait grandi et dont elle se souvenait parfaitement. La maison n’existait plus. Un poste de police avait été construit à sa place. »
Né et ayant grandi à Saint-Mathias-sur-Richelieu, le conteur n’en est pas à sa première visite à la SPEC, où il se sent forcément un peu chez lui. Ses fans ont particulièrement apprécié son spectacle Vie et mort d’un char boiteux en 2023. Tout à la fois conteur, comédien, animateur, musicien, auteur, improvisateur et metteur en scène, il ne manque pas de ressources pour apporter à ses propositions scéniques des dimensions inattendues, singulières, riches de sens. « Le rythme et la danse font toujours partie de mes créations », nous rappelle-t-il. On ne s’étonnera pas de découvrir dans cette nouvelle création que le mouvement est associé à la parole, que la musique supporte le rythme du récit, que l’éclairage apporte son lot de moments magiques.
En effet, le remarquable travail sur la lumière, qui fait de l’eau un personnage, donne un effet extraordinaire à certaines scènes. En conjuguant chorégraphies et éclairages, les artisans de cette œuvre scénique ont réussi à donner l’illusion de la présence de l’eau et de son mouvement. C’est à voir !
Conte. Texte et interprétation : Stéphane Guertin. Mise en scène et chorégraphie : Jocelyn Todd, Stéphane Guertin et Dillon Orr. Production : Effet Papillon. Partenaire : Conseil des arts de l’Ontario. Durée : 1 h 15, sans entracte.
Stéphane Guertin30, boulevard du Séminaire N.,
Saint-Jean-sur-Richelieu, QC
J3B 5J4
Du lundi au samedi de 10 h à 18 h.