11/05/2025

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Rachid Bouali: Et les histoires incroyables de sa mère
Page 42 Bouali Photo Christian Matthieu

Par Valérie Legaut. Rachid Bouali revient au Québec avec bonheur cet automne pour présenter Le jour où ma mère a rencontré John Wayne au Pôle culturel de Chambly. Chaque fois qu’il traverse l’Atlantique, le conteur français fait le « plein d’humanité » avec un public dont la réceptivité l’émeut chaque fois.

La mise en scène de ses spectacles ressemble beaucoup à celle des humoristes. Pourtant, Rachid Bouali est à mille lieues du monologue comique. « On va rire, mais on va aussi apprendre des choses. Le conte est un art imprégné d’humanité. Je deviens très fragile sur scène, car mes sujets sont souvent très sensibles. Ça prend de l’audace pour les raconter. C’est ce qui rend le conte émouvant. Quand je peux faire rire et pleurer les gens, je peux dire que j’ai réussi ma mission », explique le volubile conteur.

D’origine kabyle, Rachid Bouali est né en France de parents algériens qui se sont établis dans les années 1960 en banlieue de Roubaix, ancienne capitale du textile. Son quartier, la Lionderie, était peuplé d’une dizaine de nationalités à forte majorité musulmane. « Quand tu ramènes un mouton en ville pour l’aïd [la fin du ramadan], ça crée à chaque fois des embryons d’histoires ! » s’exclame-t-il.

Prenant comme point de départ le jour où il a quitté le domicile de ses parents, Rachid Bouali raconte et joue avec humour et émotions des souvenirs, des anecdotes à propos de sa mère. « Tous les matins, ma mère me racontait ses rêves. Elle commençait toujours par “Cette nuit, j’ai vu des choses incroyables…” Ses récits, à vous couper le souffle, étaient un savant mélange de sa Kabylie natale et de sa condition de femme de ménage à Roubaix, le tout servi par des acteurs américains du feuilleton qu’elle avait vu la veille. Tout y était : plan large, travelling, champ, contrechamp… J’étais face à elle comme devant un écran de cinéma. Et ça me mettait en retard pour l’école. »

En s’appuyant sur les témoignages qu’il a recueillis, il évoque aussi les autres mères de son quartier et les exploits du quotidien qu’elles ont bien souvent dû accomplir. Ce spectacle est l’occasion de mettre en lumière les sacrifices et renoncements que certaines d’entre elles ont dû faire pour que leurs enfants puissent trouver leur place dans la société. Il en résulte un spectacle engagé, incisif, émouvant et drôle.


Rachid Bouali en profite aussi pour mettre sa double culture kabyle et française de l’avant. « Ça donne forcément des choses drôles, car mes parents ne comprenaient pas tous les codes de la France. En même temps, ils tenaient à ce qu’en France, on réussisse comme des Français. »

D’abord comédien amateur, Rachid Bouali aime raconter qu’il est entré dans le théâtre par effraction, au sens propre comme au figuré ! « J’étais encore à l’arrêt de bus avec mes amis. Il ne se passait rien dans nos vies. C’est l’animateur socioculturel du coin qui nous a ramenés au centre communautaire. Nous, on ne faisait que suivre les filles qui allaient jouer au théâtre. Comme la porte était verrouillée, je suis entré par la fenêtre. J’ai continué le théâtre seulement pour être avec les filles ! », se justifie-t-il.

Par la suite, Rachid Bouali a lentement bifurqué vers le conte en créant un spectacle aux côtés de son frère percussionniste. Il s’est aussi inspiré de plusieurs conteurs français, mais aussi québécois. Sa première tournée au Québec remonte à 2001 avec nul autre que Fred Pellerin. Le jeune artiste de Saint-Élie-de-Caxton n’en était qu’à ses tout débuts. Aux Dimanches du conte, soirées jadis tenues au Sergent recruteur à Montréal, il a fait la rencontre de plusieurs autres conteurs marquants. Jocelyn Bérubé et Jean-Marc Massie, deux figures de proue du genre au Québec, sont de ceux-là.

Pendant longtemps, Rachid Bouali s’est posé des questions sur son identité. Qui est-il réellement ? « J’ai résolu ma crise d’identité en me rendant compte qu’elle ne tenait qu’à une conjonction de coordination. Je suis à la fois Arabe, et Magrébin, et indigène, et immigrant de deuxième génération, et kabyle ! », dit-il maintenant avec assurance.

Rachid Bouali nous convie donc à un voyage singulier, où l’imaginaire et la réalité s’entrelacent avec une incroyable fluidité. Une fresque intime et universelle où les récits du quotidien prennent des allures de légende cinématographique.

Conte. Écriture et interprétation : Rachid Bouali. Mise en scène : Alain Mollot. Coproduction: Le Grand Bleu (Lille), Le Strapontin (Pont-Scorff). Avec le soutien de la DRAC et du Conseil régional des Hauts-de-France. Durée : 1 h 15, sans entracte.

Rachid Bouali
18 octobre 2025 à 20 h
Salle Emma-Albani
Pôle culturel de Chambly

Photo Christian Matthieu

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