Par Francis Hébert. Le Français Jules Grison revient en nos terres, cette fois-ci avec les chansons de Gilbert Bécaud dans ses bagages, cet artiste que l’on surnommait « monsieur 100 000 volts » à cause de son explosivité. Au moment où on le rejoint au téléphone, l’interprète de 40 ans revenait de New York, où il a présenté son spectacle sur Charles Aznavour.

Jules Grison est également auteur-compositeur. Il prépare un premier album dans la mouvance pop d’un Marc Lavoine : « Mais pour être franc, je préfère reprendre Aznavour et Bécaud, parce que l’écriture est incroyable. On n’écrit plus comme ça aujourd’hui. Les gens n’ont plus envie d’entendre ça à la radio. Ça ne correspond pas à la demande actuelle. Mais moi je suis un amoureux de la langue française. L’intérêt pour nous c’est de conserver cette richesse qui fait la culture qui, elle, fait un pays. Ça rassemble les gens autour d’un lien. On se sent habité d’un devoir de conservation. On est des messagers, on veut transmettre tout ça aux générations futures. J’aimerais que les spectateurs viennent avec leur papa et leur maman, mais aussi avec leurs enfants. »

Ces chansons d’antan avaient de l’ampleur, elles respiraient large. Elles n’étaient pas confinées dans l’intime et le murmure. Repensons à Jacques Brel ou Léo Ferré. Et cette démesure plait sûrement à Jules Grison. Il voit grand. Son spectacle sur Aznavour sera d’ailleurs repris bientôt avec un orchestre symphonique, en France comme au Québec. Son Bécaud, il l’a présenté à l’Olympia, la salle mythique parisienne. D’ailleurs, Grison l’appelle Gilbert.

« Mon parcours est un peu similaire à celui de Gilbert. Je me retrouve dans son écriture et son interprétation. J’ai débuté le piano à l’âge de huit ans. Ensuite, j’ai commencé à chanter et à écrire mes chansons. Bécaud passait encore à la radio dans les années 90, mais moi je l’ai découvert à la maison, par mes parents. »

Son hommage à Gilbert Bécaud remonte à loin. Il en a présenté plusieurs versions différentes. Au Québec, Grison ajoute même quelques chansons qui ont eu un succès plus spécifiquement chez nous. Il y aura même une interprète féminine surprise, mais pas moyen d’en savoir plus, juste qu’elle vient d’ici : « Il y a plusieurs chansons dans le spectacle que je ne chante pas moi-même car elles sont bien plus jolies par des voix féminines. Par exemple, La balade des baladins, ce n’est pas moi qui la chante. »

De son répertoire actuel, on retrouve des classiques comme C’est en septembre, L’amour est mort, Nathalie, Un peu d’amour et d’amitié. Et pour les vingt dernières minutes, chaque soir, il demande au public de suggérer des titres : « Pour la première tournée, tous les soirs, on me demandait La maison sous les arbres. Et je ne la connaissais pas ! Je l’ai écoutée, elle est magnifique, alors je l’ai mise au répertoire. Elle est devenue une incontournable. »

On sent Grison ému, enthousiaste, toujours fébrile. C’est une histoire qui plonge ses racines profondément en lui, mais il ajoute quelques touches d’humour lorsqu’il la raconte : « Il y a une dizaine d’années, j’avais participé à un hommage à Bécaud, nous étions cinq ou six chanteurs. À ce moment-là, j’avais rencontré la famille Bécaud qui était venue voir le spectacle, ses enfants, sa femme. Je m’étais promis que je remonterais un hommage à Bécaud. Alors j’ai harcelé mon producteur, il a fini par craquer. Quand il a découvert le répertoire, il a dit qu’il fallait absolument le remettre sur le devant de la scène, dans la lumière, là où il doit être. »

Revue musicale. Idéation et interprétation : Jules Grison (chant). Collaboration artistique : Emily Bécaud et Laurent Balandras. Direction musicale : Christophe Galizio (batterie), Sébastien Machado (piano). Musiciens : Tony Sgro (basse), Claude Tedesco (violon et claviers). Production : Gil Marsalla et Directo Productions. Durée : 1 h 30, avec entracte