Par Philippe Renaud. Une perle cachée dans l’avalanche d’albums québécois parus en 2023 : Fabula Femina, œuvre présentée comme « un vibrant hommage aux poétesses, de la Renaissance à nos jours », chantée par Coral Egan, imaginée par Jean-Félix Mailloux, compositeur, contrebassiste et fondateur de l’ensemble Cordâme. Pour les amateurs de musique classique, les férus de jazz, ou les deux à la fois.

« J’ai eu un parcours académique en deux temps », explique Jean-Félix Mailloux. Des études secondaires consacrées à la maitrise de la contrebasse et à l’apprentissage du répertoire classique. Études collégiales dirigées vers le jazz, après avoir eu une révélation à l’été 2005 : « Je devais être en secondaire 4, j’étais allé voir Pat Metheny et Charlie Haden au Théâtre Maisonneuve, pendant le Festival international de jazz de Montréal. Wow ! Je n’avais jamais entendu de la musique comme ça ! Ça a été un évènement déclencheur » dans la vie du musicien, qui a enchainé avec des études supérieures à l’Université de Montréal.

Un pied dans le jazz, un autre dans la musique classique, et les deux mains dans les traditions musicales d’ailleurs, Jean-Félix Mailloux est l’un des plus polyvalents et singuliers musiciens de la scène québécoise, alignant les projets aussi divers qu’un duo mariant le jazz à la musique perse (Perséides, avec le compositeur et joueur de santour Amir) et les projets jazz fusion Bomata (trio) et Solawa (quintette).

Cordâme se démarque par son inclinaison classique, ses références à la musique romantique et moderne, ayant déjà édité des albums inspirés par l'œuvre de Maurice Ravel (en 2022), Claude Debussy (en 2018) et Érik Satie (2016). « C’est sûr que la musique de Debussy et de Ravel n’est jamais loin dans mon travail, s’emballe Mailloux. Au niveau des orchestrations, je dois aussi dire que j’ai un gros coup de cœur pour l'œuvre d’Igor Stravinski – un compositeur extrêmement audacieux, surtout dans son utilisation des instruments à vent », et lui-même féru de jazz.

Ainsi, Jean-Félix Mailloux et ses musiciens – la douce Coral Egan au chant, Marie-Neige Lavigne au violon, Sheila Hannigan au violoncelle, Éveline Grégoire-Rousseau à la harpe et Louis-Vincent Hamel aux percussions – promettent l’enchantement et l’élégance de la musique de chambre, conjuguée à une section rythmique jazzée « qui suit les contours des mélodies. Il y a toujours une part d’improvisation dans mes pièces », et davantage en concert, assure le contrebassiste, qui l’automne dernier était invité à se produire en Corée du Sud avec Cordâme. « J’aime donner la place à tout le monde pour qu’ils puissent s’exprimer. »

« Lorsque j’approche un nouveau projet, abonde Mailloux, je ne pense jamais en termes de styles, ou de mélanges de styles. Je fais la musique qui me vient, mais j’apprécie toujours d’avoir ce jeu de basse en pizzicato, avec la batterie qui suit, alors c’est sûr qu’il y a toujours une couleur jazz à chacun de mes projets. Mon objectif, c’est de créer de la beauté, tout en m’assurant que la musique reste accessible à des gens qui ne sont pas nécessairement initiés » au jazz ou à la musique classique. « Et je tiens à dire que le Théâtre des Deux Rives est un endroit où j’apprécie énormément jouer, insiste-t-il. La salle est belle et l’équipe y fait un travail de développement des publics exceptionnel. »

L’année qui vient de commencer promet d’être fertile pour Mailloux et ses collègues : en plus d’un projet de développement de publics destinés aux écoles, le compositeur prévoit déjà l’enregistrement d’un prochain album de Cordâme en collaboration avec des musiciens de l’Orchestre symphonique de Drummondville, sous la direction de maestro Julien Proulx.

Le compositeur, contrebassiste et fondateur de l’ensemble Cordâme, Jean-Félix Mailloux

Musique de concert. Jean Félix Mailloux : composition et contrebasse. Coral Egan : voix. Marie Neige Lavigne : violon. Sheila Hannigan : violoncelle. Éveline Grégoire-Rousseau : harpe. Louis-Vincent Hamel : batterie. Production : Malasartes. Durée : 1 h 30, avec entracte.

Cordâme
11 février 2024 à 15 h 30
Salle Desjardins
Théâtre des Deux Rives

Photo Gabriel Aldama