Par François Marchesseault. Les sœurs Bélinda (Bel) et Christina (Quinn) Bélice forment le duo Bel and Quinn : une fusion musicale entre la musique haïtienne, le jazz, le soul et le funk, où le chant et les mots s’élèvent à la fois en français, en créole et en anglais. Des mélodies qui transportent en elles guérison et espoir.

C’est Quinn, surnom que lui a donné sa mère, qui se prête au jeu de l’entrevue en ce matin de novembre. Christina et sa sœur baignent dans la musique depuis déjà un bon moment : « Nous avons commencé à faire de la musique quand nous étions adolescentes. La musique, c'était vraiment comme de la guérison pour nous. » Guérir, le mot reviendra souvent au cours de la conversation. Les notes et les envolées lyriques, comme un baume pour apaiser les problèmes d'anxiété, de dépression, ainsi que l’enfance difficile vécue par les deux sœurs.

Christina ne cherche pas à expliquer en détail les problèmes rencontrés et ça n’a pas tant d’importance. L’essentiel de son propos, comme la musique de son duo, demeure optimiste. Comme une quête de lumière constante, pour elles, mais également pour nous, auditeurs et spectateurs.

La musicienne est guitariste jazz et a étudié en interprétation à l’Université de Montréal. Pour elle et Bélinda, il était tout naturel d’emprunter cette avenue musicale. D’y mêler également le soul. La musique haïtienne, bien que présente à la maison durant leur enfance, est venue les interpeller plus tard, en grandissant, alors qu’elles cherchaient à savoir d’où elles venaient. Connaitre leurs origines : « On s'inspire beaucoup des petits groupes de jazz qui étaient là, dans les années 70, 80, 90, en Haïti. Ce que l’on appelle des petits combos de jazz. Je peux penser à Ibo Combo. Notre band favori, c'est le Caribbean Sextet. »

Les influences sont nombreuses. Chez les plus fortes, en soul et en jazz, on trouve les noms de Marvin Gaye, Stevie Wonder et la grande Nina Simone.

Au cœur de leur album Donte sann yo (dompter les cendres, en créole), paru en 2023 et nommé à la fois aux prix Juno et au Gala de l’ADISQ, se trouve une formidable célébration de la femme et de sa force. Ses forces. Autour de Bel et Quinn, dix femmes musiciennes sont venues ajouter leur talent et leur sensibilité aux musiques du duo. « Ce que l’on voulait démontrer, c'est qu’en jazz, les femmes sont capables d'improviser. Nous sommes capables de composer et d’effectuer des arrangements musicaux. C'est pourquoi nous avons engagé dix femmes pour cet album. »

Une façon d’apaiser le sexisme vécu par Christina lors de ses études en jazz : « C'est tout de même tabou, mais oui, il existe du sexisme dans le milieu jazz. » La musique pour cicatriser, éclairer le chemin et faire rayonner la beauté humaine, toujours.

Sur scène, c’est aussi en quartet tout féminin que Bel and Quinn présente ses pièces : « On est accompagnées de deux superbes musiciennes, notre batteuse Rébecca Legault et Stéphanie Jobin à la basse. »

La musique de Bel and Quinn porte à la danse, au mouvement du corps, même si parfois le déhanchement demeure subtil. Son propos, lui, peut toucher, faire réfléchir. Une dualité belle entre le rythme et les mots, où le soleil musical prend le dessus pour créer une œuvre dans laquelle il fait bon se lover : « Dans le fond, notre musique, c'est un chant de libération, c'est la joie, c'est la célébration, c'est un acte d'amour, de guérison et d'acceptation. »

Trouver une parcelle d’espoir, l’espoir d’un bien-être prochain et d’une possible légèreté de l’âme au bout d’un tour de chant, voilà le pari réussi de Bel and Quinn.

Photo Isabella Astolfi